Islamophobie blabla

Publié le par Nadia Geerts

Quelques jours après la consternante « Burqa blabla » qui a mis fin prématurément à un débat à l’ULB sur le thème « L’extrême droite est-elle devenue fréquentable ? » l’émission Controverse (RTL) organise un débat sur le thème de l’islamophobie. Curieuse manière de revenir sur le mardi noir de l’ULB...

 

 

Après s’être emparé du micro que lui tendait Guy Haarscher et avoir scandé à nouveau son « Burqa blabla », Souhail Chichah a en effet dénoncé l’islamophobie, de gauche comme de droite. Plus tard, on a appris dans la presse que cette action était motivée par le fait que, bien qu’ayant demandé à pouvoir faire partie du panel d’intervenants, Souhail Chichah n’avait pas obtenu gain de cause, refus qui marque selon lui la « colonisation » dont souffrent toujours les descendants d’immigrés. Mais s’agissait-il réellement de cela ?

 

Une rapide recherche sur internet ne m’a pas permis de trouver la moindre publication de Souhail Chichah sur le thème de l’extrême droite. Quelle légitimité aurait-il donc à en parler ? Economiste, spécialisé en « économie de la discrimination » ( ??) Souhail Chichah ne peut se prévaloir de la moindre compétence en ce qui concerne l’analyse du discours de l’extrême droite. Et quand bien même : si je devais saboter toutes les conférences auxquelles je ne suis pas invitée à participer, et si toutes les personnes pouvant se prévaloir d’une quelconque expertise dans un quelconque domaine faisaient de même, plus aucune conférence ne pourrait avoir lieu.

 

Mais ce n’est évidemment pas de l’extrême droite que Souhail Chichah aurait voulu débattre. Son obsession à lui, c’est l’islamophobie, et Caroline Fourest en est à ses yeux l’incarnation. Revendiquer un débat contradictoire sur la personne de Caroline Fourest serait toutefois jugé incongru, voire imbécile, car dans une université, et plus largement dans un cercle intellectuel quel qu’il soit, on ne débat pas des personnes, mais des idées. Alors, Souhail Chichah déplace le débat : il voit – ou fait mine de voir - dans les ennuis qui s’accumulent sur sa tête le signe que la Belgique est « islamophobe ». Thèse difficilement soutenable, dès lors que d’une part il n’est pas musulman, et que de l’autre il n’a pas vraiment le profil des « damnés de la terre » et autres « exclus du système », comme en témoigne à suffisance son poste de chercheur et d’assistant à l’ULB.

 

Mais c’est plus facile, évidemment, de voir partout le spectre du grand méchant monstre raciste – car « islamophobe » n’est évidemment qu’une autre manière de nommer le « racisme » anti-musulmans – que d’admettre qu’insulter régulièrement ses collègues et saboter une conférence organisée dans son Alma Mater est pour le moins peu collégial et dénote, outre une incapacité crasse à participer au débat argumenté, une loyauté vacillante envers l’université qui l’emploie.

 

Le plus consternant est que certains lui emboitent le pas, voyant dans la « Burqa blabla » l’expression d’un malaise social. Il est sans doute vrai qu’être d’origine arabo-musulmane n’est pas toujours facile. Les discriminations sont une réalité, tout comme la défiance d’une partie de la population envers une religion perçue comme revendicatrice et en porte-à-faux avec la laïcisation de la société. Mais cela doit-il tout excuser ? Après tout, c’est sur fond de malaise social qu’a grandi le nazisme dans les années trente. Les partisans de l’extrême droite actuelle, eux aussi, peuvent certainement se prévaloir d’un malaise social : la société change, la multiculturalité les inquiète, leur fait perdre leurs repères, etc. Ce Monsieur Pennincks qui m’adresse des menaces de mort sur ce blog est très certainement aussi hanté par un malaise social, même si de toute évidence, il a encore la chance de posséder une voiture dont le pare-choc va me défoncer le crâne.

Faut-il alors minimiser les agissements de ces énergumènes ? Faut-il pardonner aux nazis des années trente, qui subissaient de plein fouet la crise économique et le « malaise social » ?

 

Il est plus que temps de mettre fin à ce discours victimaire. Quand Alain Destexhe ironise sur les « Norvégiens » qui ont vandalisé la station de métro Horta, la réprobation est unanime, et à raison. Pourtant, qui nous dit que sa tirade n’est pas l’expression d’un « malaise social ». Pourquoi se trouve-t-il des démocrates pour défendre Chichah, et aucun pour défendre Destexhe ? La réponse coule hélas de source : l’un est d’origine étrangère, l’autre pas. De ce fait, l’un aurait le droit de mentir effrontément, de recourir à l’insulte la plus grossière, de déshonorer son université, de flirter avec l’antisémitisme. Et l’autre pas.

 

Souhail Chichah mérite mieux : quoi qu’il en dise lui-même, il n’a rien d’un colonisé ni d’un indigène du royaume. Il fait partie de mes concitoyens, il a un statut social enviable, une formation intellectuelle, bref il maîtrise parfaitement les codes en vigueur. Tellement bien qu’il réussit à ce qu’une émission grand public l’invite sur son plateau pour débattre de l’ « islamophobie ». Bien joué. (1)

Personnellement, je ne suis pas dupe. Et je continuerai à me battre pour que tous, indépendamment de nos origines, de notre ethnie, de notre sexe, de nos convictions, soyons traités à égalité. Sans qu’aucune de ces caractéristiques ne puissent constituer ni un handicap, ni un privilège.

 

(1) Souhail Chichah a finalement annoncé, quelques minutes avant le début de l'émission, qu'il refusait de débattre seul contre tous. Le pauvre chou était plus courageux quand il s'agissait de s'attaquer à quarante à une conférencière que pour affronter sept contradicteurs... 

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