Cours de morale: stop ou encore ?

Publié le par Nadia Geerts

Le 17 novembre dernier avait lieu au Parlement de la Communauté française un colloque intitulé « Quel avenir pour notre cours de morale ? ». Des extraits de ce colloque, émaillés d’interventions des initiatrices Véronique Jamoulle et Isabelle Emery, ainsi que de témoins privilégiés, sont à découvrir sur http://tinyurl.com/5df4se.

Personnellement, je retiendrai deux choses de ce colloque et de sa présentation vidéo : Premièrement, qu’une très nette tendance s’est dégagée pour plaider en faveur d’un cours unique pour tous les élèves. Une prise de position qui ne peut que me réjouir, puisque je défends depuis longtemps, notamment au sein du R.A.P.P.E.L., l’idée que les cours improprement appelés « philosophiques » constituent une survivance obsolète des guerres scolaires qui ne correspond absolument pas aux besoins du monde scolaire aujourd’hui.
A l’heure ou la société belge est de plus en plus multiculturelle – mais pas vraiment interculturelle malheureusement – il est grand temps de remplacer ces cours fonctionnant comme de petits ghettos idéologiques par un cours qui permettrait la rencontre, la réflexion et le débat. L’école manque dramatiquement d’un lieu où les élèves athées, musulmans, chrétiens, orthodoxes et juifs pourraient échanger sur ce qui les divise, mais aussi sur ce qui les rassemble, tout en construisant cet indispensable socle de valeurs communes qui fonde le vivre ensemble.
L’ouverture à la pratique philosophique, aux sciences humaines, à l’histoire des religions et des philosophies, l’éducation citoyenne, affective et sexuelle, voilà autant de thèmes qui, s’ils constituent la colonne vertébrale du cours de morale actuel, mériteraient amplement d’être proposés à tous les élèves, quelles que soient leurs convictions philosophiques ou religieuses. Visiblement, nombre de professeurs de morale sont aujourd’hui conscients de l’absurdité d’un cours au programme aussi ambitieux, très éloigné d’une quelconque initiation à l’irréligiosité ou à l’incroyance, mais ne s’adressant parfois qu’à une faible minorité des élèves d’un établissement scolaire.

Deuxièmement, j’ai été frappée par les paroles d’Eliane Deproost, du CAL, laquelle pointait le « tabou » qui pesait désormais selon elle sur la laïcité philosophique. Manifestement, Eliane Deproost n’a pas compris qu’il ne s’agissait pas, m’a-t-il semblé comprendre au cours de ma participation à ce colloque, d’une subite autocensure qui frapperait les professeurs de morale et leur ferait s’interdire d’aborder la question de l’athéisme : plus simplement, l’urgence nous paraît autre aujourd’hui que de former de parfaits petits athées, si tant est d’ailleurs que cela ait jamais été le propos du cours de morale.
Entre transmettre à une poignée d’élèves – généralement déjà convaincus – les idéaux de la laïcité philosophique et contribuer à l’édification de tous les élèves dans le but d’un meilleur vivre ensemble, sous la bannière, si j’ose dire, de la laïcité politique, personnellement, je n’hésite pas un seul instant. Car c’est de laïcité politique que nous avons besoin de toute urgence, aujourd’hui. Et en disant cela, je ne minimise en rien l’apport indispensable de tous ces athées, humanistes – d’avant Joëlle Milquet – et autres rationalistes à la promotion de la séparation du droit et de la foi, de l’Etat et des cultes, aujourd’hui comme hier. Un apport dont rien n’interdirait d’ailleurs d’y consacrer quelques leçons dans le cadre de ce cours universaliste que j’appelle de mes vœux.

Publié dans Laïcité - religions

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