Quelle soupe !

Publié le par Nadia Geerts

Ceci n’est pas un article, mais un coup de gueule. Depuis quelques semaines en effet, on entend abondamment parler dans la presse du rapport rendu par le Réseau européen contre le racisme (Enar), pointant l’ « islamophobie » alarmante qui toucherait l’ensemble de l’Europe. Islamophobie ? Racisme ? Sexisme ? Laïcité ? L’Enar se s’embarrasse pas, semble-t-il, de ces distingos subtils…

 

Il faudrait en effet d’abord qu’on m’explique pourquoi un réseau de lutte contre le racisme s’intéresse à la discrimination envers les musulmans. J’ignorais en effet que l’islam soit une ethnie, et j’en connais, Sénégalais, Bosniaques ou Français « de souche » qui seraient très surpris d’apprendre qu’ils appartiennent à la même « minorité ethnique », dont le public persiste à avoir une perception négative, si l’on en juge par le rapport rendu par l’Enar.

 

Bref. Acceptons le cadre un brin cafouilleux, et penchons-nous donc sur les discriminations dont sont victimes les musulmans dans tant de pays européens. Une « islamophobie », donc, qui touche particulièrement les femmes.

Tiens donc… C’est bizarre, ça… Pourquoi donc les femmes, alors qu’on a tant entendu louer, dans les décennies passées, le fait que les filles « issues de l’immigration » (pardon, voilà que je me mets moi aussi à confondre ethnie, origine et religion) s’intégraient tellement mieux, réussissant souvent fort bien à l’école tandis que leurs frères, moins conscients de tout ce qu’ils avaient à conquérir via l’instruction, tenaient les murs des cités…

Pourquoi les femmes, donc ? La suite de la phrase nous l’apprend : « à cause de leur tenue vestimentaire », selon Sarah Isal, membre d’Enar.

Nous y voilà. On est donc passés en quelques lignes du racisme qui persiste en Europe, particulièrement envers les minorités ethniques, aux discriminations envers les musulmans, puis à l’islamophobie qu’exprime sans nul doute possible l’interdiction du voile islamique dans certaines fonctions.

Quel admirable tour de passe-passe ! Si donc une femme se voit refuser un emploi parce qu’elle porte le voile, si une fille se voit imposer d’enlever son voile à l’école, peu importe qu’elle s’appelle Malika, Anka, Bintou, Indah ou Marie-Thérèse, peu importe sa couleur de peau ou son origine nationale, peu importent les motifs que l’on peut avoir de lui demander de retirer son voile : c’est de l’islamophobie, de la discrimination raciale, du racisme.

 

Et personne ne semble se rendre compte que même dans certains pays musulmans, le voile – et parfois même la barbe ! – est interdit dans certaines fonctions, sans que nul ne songe, et pour cause, à y voir la moindre preuve d’islamophobie.

Alors oui, la discrimination religieuse existe certainement. Par exemple lorsqu’on suppose qu’Abdallah ou Rachida sont certainement musulmans, et vont donc émettre des revendications particulières, avoir des comportements dérangeants, etc. et ce alors qu’Abdallah ou Rachida n’ont rien dit ou fait qui puisse laisser présager de cela.

Mais si, se fichant comme d’une guigne de la religion d’Abdallah ou Rachida, on refuse de les engager sur la base seule de leur patronyme et de leur origine ethnique réelle ou supposée, c’est du racisme.

Et si, se fichant comme d’une guigne de l’origine de Fabienne, on lui demande de retirer le voile qui couvre sa tête, ce ne sera de la discrimination religieuse que si dans le même temps, Jonathan arbore une belle grande croix autour de cou et que Moshé arbore sa kippa sans que nul n’y trouve rien à redire.

 

Et cette manière d’amalgamer tout et n’importe quoi, dans l’intention évidence de disqualifier toute exigence laïque, c’est tout simplement insupportable. 

Publié dans Laïcité - religions

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :