Prières à l'ULB : De quelques libertés avec la vérité

Publié le par Nadia Geerts

La révélation de l'existence d'un lieu de prière islamique au sein de l'ULB a suscité de nombreuses réactions. Parmi elles, je relaie ici très volontiers celle du membre du personnel qui, le premier, m'a alertée sur l'existence de ce lieu, et qui tient à rester anonyme. Signalons au passage que depuis lundi, rien n'a changé : la statue est toujours voilée, et les caisses de matériel toujours là.

Ceux qui, comme moi, estiment que l'université en général, et l'ULB en particulier n'est pas un lieu de prière, peuvent cosigner ici la pétition que j'ai initiée.

 

Mon employeur, l’Université libre de Bruxelles, a réagi à la révélation par Nadia Geerts que des prières islamiques de groupe se tenaient dans la bibliothèque universitaire par voie d’un texte de Jean-Philippe Schreiber, conseiller de la rectrice à la politique institutionnelle. Malheureusement, ce texte prend certaines libertés avec la vérité, que j’aimerais souligner. Le reportage de la RTBF, diffusé au JT du soir et ne péchant pas par excès d’analyse critique, mérite également qu’on s’y attarde.


De la sauvagerie de la prière


Dans son communiqué, l’ULB affirme : « des étudiants régulièrement s’assemblent pour prier çà et là de manière sauvage, nous le savons ». Or l’article de N. Geerts révèle l’existence d’un lieu précis de prière, dont les premiers témoignages de l’existence ont au moins 8 huit ans. Ce lieu est tellement pérenne que du matériel de prière y est stocké (dont des fiches à emprunter qui évoquent « les mécréants »), une statue recouverte en permanence d’un drap et que le Cercle des Étudiants Arabo-Européens de l'ULB n’hésite pas en faire la promotion auprès des potentiels étudiants musulmans de l’ULB. Ces prières n’ont pas lieu « ça et là » mais bien « là » et elles n’ont pas lieu de manière « sauvage » mais de manière visiblement organisée.


Quand l’ULB redéfinit l’été


L’ULB nous fait aussi savoir que « depuis quelque temps, et en particulier depuis cet été, le phénomène s’est amplifié ». À ma connaissance, nous sommes toujours en été. Si c’est au début de l’été que l’ULB fait référence, cela voudrait dire que ces prières dites « sauvages » ont augmenté en nombre durant les mois d’été, c’est-à-dire pendant les vacances. On a écrit plus convaincant. De sorte que le sens réel de « depuis l’été » est « depuis des années ». Peut-être cette redéfinition du concept d’été est-elle nécessaire au vu du réchauffement climatique ? En tout cas, il semble assez clair que les autorités de l’ULB n’auraient pas réagi si cette fuite ne les y avait pas contraint.

  
La RTBF envoie ses limiers


La RTBF a, dans la foulée, envoyé une équipe dans la bibliothèque de l’ULB pour enquêter. Cette enquête révèle que la prière islamique a lieu dans une « pièce improvisée » (une improvisation de 8 ans), « loin de la foule », « au fond d’un couloir où il y a peu de passage ». En effet, il est fort probable que les enquêteurs de la RTBF y ont trouvé peu de passage : l’année académique n’a pas encore démarré… En outre, la RTBF ne mentionne aucun des éléments troublants repris par N. Geerts dans son article (la statue voilée et la mention des « mécréants » par exemple) ; juste quelques témoignages des personnes concernées pour nous faire comprendre : « rien à voir, circulez ».


De la faillite de l’esprit critique


Il fut une époque où l’on aurait attendu de ces deux institutions vénérables, engagées pour l’éclaircissement de la vérité avec de l’argent public, qu’elles tournent leur attention et leur énergie vers ces questions essentielles plutôt que d’essayer de les enfouir sous le tapis. On aurait espéré qu’à l’ULB en particulier, où l’on s’adonne avec joie à la déconstruction de tous les concepts, où l’on organise des colloques sur la « blanchité » (le 20 octobre 2022), où le langage est remis en question via l’écriture inclusive et ses points médians omniprésents et où l’on donne des visites guidées « décoloniales » du campus, une réelle discussion critique s’engage sur le rôle de l’université face à une religion prosélyte, vigoureuse, patriarcale et dont les fondements philosophiques sont à l’opposé des valeurs que représente l’ULB, en tout cas officiellement.


Malheureusement, les temps changent et les esprits avec.

 

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